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Ultimo Elvis

Très loin du Podium de Yann Moix, ce film raconte le quotidien et les aspirations d’un sosie sous l’angle du drame pur. Jamais drôle, jamais moqueur, jamais méprisant, Armando Bo filme simplement un être mal dans sa vie en s’appuyant sur la performance convaincante de John McInerny. Trop simplement d’ailleurs : le récit manque de souffle, d’enjeux, peut-être de rythme. Un film sincère mais trop modeste.

Synopsis : A Buenos Aires, Carlos Gutiérrez est Elvis, à l’usine comme sur scène où il officie pour une agence de sosies. Un accident l’oblige cependant à s’occuper de sa fille…

Ultimo Elvis - critiqueUltimo Elvis décrit l’opposition entre la vie réelle et la vie rêvée d’un homme. L’idole Elvis Presley et le sosie Carlos Gutiérrez n’appartiennent pas au même monde. Coincé dans une vie de médiocrité, Carlos essaie de coller le plus possible à son modèle. Son existence étriquée lui est devenue insupportable, mais comment devenir Elvis quand on n’est pas Elvis, comment résoudre cette contradiction identitaire, celle de vouloir être quelqu’un, de se sentir être quelqu’un, alors qu’on ne pourra jamais avoir une vie même un tout petit peu semblable?

Prisonnier de désirs de grandeur, de désirs en total désaccord avec son quotidien, Carlos ressent la nécessité de fuir. Et puis un jour, la vie se met entre lui et la porte de sortie, sous le visage angélique de sa petite fille qui a besoin de lui. Brusque retour au réel. Alors, Carlos va-t-il se laisser prendre par les plaisirs simples et banaux que la vie peut lui offrir, va-t-il abandonner ses rêves impossibles?

Armando Bo filme le décalage entre ce que vit Carlos et ce qu’il imagine (ou voudrait imaginer) vivre. Quand la réalité essaie de copier la légende, cela donne un effet toc. Pathétique et admirable, Carlos est à la fois un ouvrier insatisfait et un rêveur infatigable. Il n’y a peut-être alors qu’un seul moyen de résoudre son incompatibilité existentielle, celle de ne pas être celui qu’il voudrait être.

Si le récit est assez convaincant, il manque d’une certaine ampleur pour s’imposer à nous avec la force des tragédies intimes. Quand on pense aux idéaux échoués, on pense au poignant The Wrestler ou au sarcastique American Beauty.

Ultimo Elvis est loin de ces références car il lui manque un ton, un motif un peu plus enthousiasmant que celui d’une parenthèse (ni enchantée, ni désenchantée). Nous assistons aux jours qui défilent les uns après les autres, ne faisant que repousser un peu plus la décision de Carlos. Quand celui-ci, vers la fin du film, regarde le canapé dans lequel dormait sa petite fille, alors enfin il se passe quelque chose, une inflexion, une flamme. On attend cela tout le film, on n’y a le droit qu’à de trop rares moments. Le reste du temps, comme son antihéros, Ultimo Elvis reste collé à la banalité du quotidien.

Note : 4/10

Ultimo Elvis (titre original : El Último Elvis)
Un film d’Armando Bo avec John McInerny, Griselda Siciliani, Margarita Lopez
Drame – Argentine – 1h32 – Sorti le 16 janvier 2013

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Jours de pêche en Patagonie

Après Historias minimas et Bombon el perro, le cinéaste argentin Carlos Sorín revient avec un nouveau récit dépouillé, qui s’attache aux pas d’un homme en quête de rédemption. Le film est lent, pas vraiment passionnant, mais les acteurs sont touchants et parfois ils donnent au drame une certaine grâce.

Synopsis : A la recherche d’un nouveau départ, Marco part en Patagonie s’initier à la pêche au requin. Mais ce n’est pas l’unique raison de son arrivée dans la ville de Puerto Deseado…

Jours de pêche en Patagonie - critiqueUn film d’une simplicité désarmante sur un homme qui essaie de renaître. Fidèle à ses convictions minimalistes, Carlos Sorin en dit le moins possible. Du passé de Marco, on ne connaîtra presque rien : un métier décrit rapidement, quelques difficultés avec l’alcool, un éventuel problème de santé.

De ses relations avec sa fille et son ex-femme, encore moins : cinq phrases tout au plus, lancées au détour d’une conversation, et quelques regards évocateurs permettent de reconstituer une séparation douloureuse.

Pourquoi la relation de Marco et d’Ana s’est-elle à ce point distendue? Comment un homme qui parait aussi raisonnable, sympathique et souriant que Marco a-t-il pu abandonner les siens et (peut-être) tomber dans l’alcool? Le réalisateur préfère se concentrer sur quelques rencontres : un entraîneur de boxe, un spécialiste de la pêche au requin.

Tout cela occupe un peu le temps solitaire d’un homme qui voudrait plus que tout renouer des liens. Tant de non-dits frustrent, tant de simplicité touche au simplisme.

Pourtant, les acteurs, irréprochables, rendent le drame intime crédible d’un bout à l’autre, et la superbe musique, triste et pleine d’espoirs en même temps, participe à l’émotion diffuse qui parcourt le film. Jours de pêche en Patagonie est un film sensible sur un bout d’humanité, mais un bout si petit et si ordinaire qu’on aura bien du mal à s’emballer pour ce cinéma-là.

Note : 4/10

Jours de pêche en Patagonie (titre original : Días de Pesca)
Un film de Carlos Sorín avec Alejandro Awada, Victoria Almeida et Oscar Ayala
Drame – Argentine – 1h18 – Sorti le 26 décembre 2012

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