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Man of Steel

Entre la complexité répétitive et un peu indigeste de Sucker Punch, et la simplicité un peu bêta de Man of Steel, Zack Snyder n’arrive pas à retrouver le niveau esthétique et scénaristique stratosphérique de Watchmen. Cette version de Superman nous intéresse une petite heure, puis on finit par se lasser, tant tout cela manque de piment et de relief, avec ou sans la 3D.

Synopsis : Un petit garçon découvre qu’il possède des pouvoirs surnaturels et qu’il n’est pas né sur Terre. Il devra s’engager dans un périple afin de comprendre ses origines.

Man of Steel - critiqueCertes, ici tout est mieux que dans le Superman Returns de Bryan Singer. Le méchant est moins ridicule (et ses motivations sont un peu plus intéressantes), le personnage de Lois est un peu plus travaillé (et plus séduisant), les enjeux sont un peu plus étoffés.

Mais le mythe de Superman est bien lisse et il semble décidément compliqué d’en faire émerger des films vraiment intéressants. Même la folie visuelle de Zack Snyder et les dilemmes éthiques et politiques chers à Christopher Nolan semblent avoir été standardisés, passés à la lessiveuse hollywoodienne.

Et pourtant le film commençait plutôt bien : le début sur Krypton offre quelques belles images et des combats épiques qu’on imagine être cruciaux pour l’avenir de toute une espèce. Mais une fois sur Terre, les images d’Épinal de la famille aimante, du bon fermier du Kansas, de la mère tendre et compréhensive donnent la direction que suivra dorénavant le film : celle d’un classicisme ennuyeux et fatigant à la longue.

Construit d’un seul bloc, Superman n’a rien en lui de sombre ou d’ambigu. Jamais il n’est exposé au moindre dilemme, ses choix et ses réactions sont toujours évidents, obéissant au petit livre de conduite du scout hyperpuissant.

Pourtant, grâce à une mise en scène solennelle, Zack Snyder arrive à nous faire croire à chaque instant que le destin d’un individu exceptionnel, et avec lui celui de l’humanité, est en train de se jouer. Malheureusement, la dernière heure du film, entre combats interminables et bons sentiments un peu agressifs, rompt le léger charme monolithique que le film avait su créer.

Tous devient simple à l’extrême, les êtres humains tous gentils au fond d’eux-mêmes, l’action ayant beau faire 10 fois le tour de la Terre et survoler des satellites, elle reviendra toujours se résoudre à New York, là où Lois n’aura qu’à courir 5 minutes pour assister, aux premières loges, au dénouement de l’intrigue. Et quand Kal-El crie de douleur, le spectateur est presque surpris, tant le scénario avait oublié de nous montrer qu’il n’avait pas forcément tout intérêt à zigouiller les méchants. On s’attendait plutôt à une grande danse de la joie, où à une pompeuse remise de médailles comme les américains les affectionnent tant. Et un grand bravo aux héros!

Ce qu’on reprochera le plus à Man of Steel, ce n’est peut-être pas sa naïveté (après tout, pendant 1h15, on suivait le film sans déplaisir), mais l’ennui qui s’installe quand il cède aux sirènes du pur blockbuster d’action, sans rien proposer de nouveau ou d’intrigant. Du pur calibrage vidé de toute substance, façon Avengers.

Note : 3/10

Man of Steel
Un film de Zack Snyder avec Henry Cavill, Amy Adams, Michael Shannon, Diane Lane, Russell Crowe, Antje Traue et Kevin Costner
Fantastique – USA, Canada, Royaume-Uni – 2h20 – Sorti le 19 juin 2013

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Take Shelter

Grand Prix de la Semaine de la Critique au Festival de Cannes et Grand Prix du Jury au Festival de Deauville en 2011, Take Shelter a été unanimement acclamé. C’est que le film de Jeff Nichols dégage un charme magnétique qui impressionne. Take Shelter crée une attente qui ne sera ni négligée, ni vraiment satisfaite. Un entre-deux frustrant et un peu regrettable.

Synopsis : Curtis mène une vie paisible jusqu’à ce que des visions apocalyptiques envahissent peu à peu son esprit. La menace d’une tornade finit par l’obséder…

Take Shelter - critique

Les acteurs sont excellents : Jessica Chastain immaculée (on pense forcément à The Tree of Life), Michael Shannon terrifiant. Le film colle à la peau de son personnage jusqu’à ce que sa perception soit la seule qui nous soit accessible, jusqu’à ce que sa réalité imprègne l’écran et fasse douter le spectateur au-delà du raisonnable.

Flirtant avec le fantastique, Take Shelter semble ne pas vouloir prendre position, il ne démêle jamais les fils du rationnel et de l’irrationnel et nous laisse terrifiés par une peur incontrôlée, absurde et mal identifiée (peur de l’apocalypse? peur de la schizophrénie?).

A force de chercher la sécurité, à force de vouloir se protéger et protéger sa famille (cocon protecteur tout autant que nid à traumas), à force de croire à ses fantasmes, Curtis se laisse emporter par la folie et devient extrêmement dangereux. La peur mène au pire, l’obsession de la sécurité est une impasse. N’est-ce pas d’ailleurs la peur elle-même qui rend finalement nécessaire l’apocalypse ?

Jeff Nichols est talentueux, son film est fascinant bien qu’un peu long par moments. Pourtant, cette fascination semble tourner simplement sur elle-même. Malgré sa beauté formelle, malgré l’angoisse qu’il distille, Take Shelter laisse un goût d’inachevé. La fin du film fait peser une lourde ambiguïté sur l’histoire et sur le propos, et la tension accumulée, répétée, accentuée à l’excès, nous apparaît un peu vaine.

On ne sait pas où mène Take Shelter, on se demande en définitive s’il reste autre chose après la projection que ce cri éponyme, cette angoisse brute nourrie de rien, nourrie de toute l’incertitude dont est faite le monde. Un presque beau film.

Note : 6/10

Take Shelter
Un film de Jeff Nichols avec Michael Shannon, Jessica Chastain et Tova Stewart
Drame – USA – 2h00 – Sorti le 4 janvier 2012
Grand Prix, Prix SACD et Prix FIPRESCI à la Semaine de la Critique du Festival de Cannes 2011

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