Archives de Catégorie: Films sortis en 2013
L’Attentat
L’Attentat propose une intrigue terrible et passionnante, dans laquelle un homme est amené à reconsidérer toute son existence. Jusqu’à quel point celui avec lequel on partage notre vie peut-il rester un étranger? Malheureusement, au-delà d’un portrait social juste et pertinent, le film semble finalement comprendre ou accepter l’inacceptable.
Synopsis : Toute la journée, le docteur Amine, israélien d’origine arabe, opère les nombreuses victimes d’un attentat-suicide, avant d’apprendre que la terroriste était sa propre femme.
Le début du film pose avec talent les bases d’une situation aussi terrible qu’intrigante. Et introduit de nombreux éléments inhabituels, à l’opposé des clichés traditionnels sur le conflit israélo-palestinien. L’arabe israélien est un grand médecin, reconnu et admiré par ses pairs juifs. La kamikaze palestinienne n’est pas une adolescente démunie, mais une adulte privilégiée, éduquée, intégrée à la société israélienne.
L’Attentat a le mérite rare de donner des nouveaux visages, moins stéréotypés, à tous les acteurs du conflit. Entre le mélodrame et le thriller politique, le film a de belles cartes romanesques dans son jeu (la trahison est double : celle d’avoir menti à son mari, mais aussi celle d’avoir, par son geste, nié son mode de vie et ses accomplissements, jusqu’à le mettre, lui et les arabes israéliens, dans une situation très inconfortable, nourrissant la spirale de la haine).
Mais en refusant presque tout parti pris, l’intrigue s’embarque peu à peu sur le terrain glissant de la compréhension. Il ne suffit pas d’évoquer la politique déplorable d’un pays (ou des actes scandaleux) pour trouver un début d’explication à un acte meurtrier inacceptable.
De la même façon que rien ne peut légitimer la torture, rien ne peut justifier qu’on agisse dans le but de tuer des civils innocents. Qu’Amin semble finalement apaisé, comme réconcilié avec sa femme, semble évoquer l’indulgence d’un homme dont le parcours l’a amené à mieux saisir les motivations qui lui étaient au début étrangères.
Si L’Attentat dresse un portrait très juste de la situation très compliquée des arabes d’Israël, le film semble vouloir donner à comprendre, voire réhabiliter chaque point de vue. En oubliant quelques principes fondamentaux : subir le mal n’autorise jamais à en faire; le meurtre de sang froid (prémédité qui plus est), quelles qu’en soient les raisons, est une barbarie inacceptable.
Note : 4/10
L’Attentat (titre original : The Attack)
Un film de Ziad Doueiri avec Ali Suliman, Reymonde Amsellem, Evgenia Dodina et Karim Saleh
Drame – France, Belgique, Liban, Qatar – 1h45 – Sorti le 29 mai 2013
Les Beaux Jours
Fanny Ardant et Laurent Laffite, 25 ans d’écart, s’éprennent l’un de l’autre. Malheureusement, le film avance de lieux communs en lieux communs, s’appuyant sur des personnages égoïstes et tièdes dont le bonheur nous importe finalement bien peu. Marion Vernoux s’enthousiasme pour une histoire assez laide, révélant une bien triste vision des gens et des relations humaines.
Synopsis : Caroline, fraîchement retraitée, n’a devant elle que du temps libre et encore du temps libre. Sa rencontre avec Julien, qui a l’âge de sa fille, va bouleverser son quotidien.
Certes, au cinéma on voit peu d’histoires d’amour entre une jeune sexagénaire et un homme qui n’a pas encore quarante ans. Est-ce que ce simple argument suffit pour justifier une romance banale qui enchaîne pendant 1h30 tous les clichés de la relation adultère?
L’amour n’a pas d’âge. D’accord, mais cela excuse-t-il que plus rien d’autre n’ait d’importance, ni les relations d’une vie, ni la confiance, ni le respect de celui qui partage notre existence? C’est avec une totale insouciance, sans l’once d’un remords (ou d’une hésitation) que Caroline se lance dans son aventure. Les réactions du mari, de la fille de Caroline, des amies du centre de loisirs pour retraités, appuient toutes une vision de la vie et du couple où le mensonge et la trahison n’ont aucune espèce d’importance. Caroline ne doit rien à Philippe, la seule chose qui compte, c’est qu’elle trouve son bonheur et son plaisir.
En célébrant l’épanouissement individuel, à tout âge et en toute situation, Marion Vernoux célèbre aussi une société individualiste où chacun s’occupe d’abord de soi et de sa libido avant de prendre soin des autres. Embarqués dans une course à la réalisation personnelle et à la liberté sans contrainte et sans concession, les personnages du film se regardent tous beaucoup, très occupés à décoder leurs désirs et leurs frustrations.
C’est d’abord le cas de Caroline, qui nous est tout de suite très antipathique. Trop absorbée par la contemplation de son nombril, elle n’a aucune attention pour ceux qui l’entourent, encore moins pour l’homme qui partage sa vie. Quant à Julien, il est tellement creux et arrogant qu’il est très vite insupportable (Laurent Laffite n’y est pas pour rien). Il reste Philippe, victime consentante un peu trop molle pour qu’on ait même envie de le défendre. Et une cohorte de retraités trop sympathiques, dont les jeux dépressifs ne nous arrachent ni sourire ni émotion.
Alors, Les Beaux Jours, ce sont ceux qui nous restent, quelque soit notre âge, ce sont ceux où l’on s’occupera seulement de nous-mêmes et de personne d’autres, ceux où l’on réalisera enfin nos fantasmes (aux dépend de ceux qui nous aiment), ceux où l’on sera enfin libres… et seuls. Caroline pourrait assumer ses nouveaux désirs, essayer de comprendre ses sentiments avec son mari, prendre avec lui les décisions qui s’imposent. Elle pourrait être faible et tourmentée. Non, elle est simplement désinvolte et narcissique, elle fait souffrir par simple inconséquence.
L’histoire d’amour est moche. La façon de voir la vie qui se dégage du film est moche. Et qui plus est, le scénario est tout construit de lieux communs sans saveur. L’âge n’y fait rien, la flamme est bien pâle quand on ne vit que pour soi.
Note : 2/10
Les Beaux Jours
Un film de Marion Vernoux avec Fanny Ardant, Laurent Lafitte et Patrick Chesnais
Comédie dramatique – France – 1h34 – Sorti le 19 juin 2013
Fast & Furious 6
On n’attend pas grand chose du sixième opus d’une franchise, surtout quand cette franchise s’appelle Fast & Furious. Et pourtant… Il faut reconnaître à Justin Lin un véritable talent pour orchestrer des séquences d’action stupéfiantes et jubilatoires. Le résultat : un film d’action too much, carrément jouissif par moments.
Synopsis : Hobbs traque un groupe de chauffeurs redoutables, dont le meneur, Shaw est secondé d’une de main de fer par l’amour que Dom croyait avoir perdu pour toujours : Letty…
Après Fast & Furious 5, étonnant de dynamisme et de scènes grandioses, Fast & Furious 6 reprend le flambeau sur les mêmes bases. Après un générique de début qui résume les 5 épisodes précédents, affirmant l’existence d’une mythologie Fast & Furious, le film avance sur un rythme effréné, ne laissant que très peu de répit au spectateur.
Le scénario est assez anecdotique (bien que finalement au niveau de la majorité des James Bond) mais ici, ce n’est pas l’histoire qui nous retient à l’écran. Et même si le film traine un peu au milieu, une scène de saut de l’ange nous coupe le souffle tandis que la séquence finale est simplement démentielle. On admire l’inventivité de Justin Lin, qui arrive encore à nous surprendre avec des intrigues simplistes et des bolides imposants. Et surtout à nous procurer de véritables sensations fortes.
Note : 5/10
Fast & Furious 6
Un film de Justin Lin avec Vin Diesel, Paul Walker, Dwayne Johnson, Michelle Rodriguez, Jordana Brewster, Tyrese Gibson, Ludacris, Sung Kang, Gal Gadot et Luke Evan
Action – USA – 2h10 – Sorti le 22 mai 2013
Epic : La Bataille du Royaume Secret
Epic propose de jolies images et quelques gags bien sympathiques. Mais perdu quelque part entre Dragons, Les Croods et Arthur et les Minimoys, le film de Chris Wedge peine à trouver sa place et son identité propre. Et même si on rit pas mal, le schéma bêtement manichéen de l’histoire n’arrange rien.
Synopsis : Lorsqu’une adolescente se retrouve plongée par magie dans un univers miniature, elle doit s’allier à des personnages singuliers afin de sauver leur monde… et le nôtre.
Chris Wedge, le créateur de L’Âge de glace, a tout misé sur la beauté de l’univers qu’il a créé et sur les scènes d’action entraînantes. Le monde d’Epic est très convaincant, certaines trouvailles visuelles sont même étonnantes et les cascades sont souvent réussies et bien filmées.
Le point faible du film, c’est l’histoire, déjà vue mille fois sous des formes diverses et variées. Le scénario et les personnages font même beaucoup trop penser à Arthur et les Minimoys (même si ici, tout est moins bête et moins grossier). L’aventure, très manichéenne, se suit sans mal, mais manque d’enjeux et d’ambition.
Restent de nombreux gags convenus et quelques moments plutôt drôles. Ainsi, chose rare pour des personnages uniquement comiques, l’escargot et la limace sont plutôt amusants. On retient aussi une très bonne blague concernant le cycle de vie des mouches. Par contre, Les relations paternelles sont particulièrement niaises.
Après The Croods, le cinéma d’animation américain confirme qu’il est aujourd’hui friand de grandes aventures écologiques. Epic nous fait passer un moment sympathique mais sans singularité. On l’oublie très vite.
Un film-type, noyé sous la masse de ses modèles et de ses copies à venir. Pour découvrir toute la poésie et l’originalité qu’on peut tirer d’un sujet similaire, courez voir Arrietty, le petit monde des chapardeurs du Studio Ghibli.
Note : 4/10
Epic : La Bataille du Royaume Secret (titre original : Epic)
Un film de Chris Wedge avec les voix d’ Amanda Seyfried, Josh Hutcherson, Steven Tyler, Colin Farrell, Christoph Waltz et Beyoncé Knowles
Film d’animation – USA – 1h42 – Sorti le 22 mai 2013
Shokuzai – Celles qui voulaient oublier
Shokuzai a été découpé en deux films pour l’exploitation en salles. Le second opus vient compléter la saga et offre au spectateur un large panorama des psychoses qu’un adulte peut développer suite aux tragédies de sa jeunesse. Et malgré les chemins alambiqués de son récit, le film arrive à trouver une cohérence étonnante et inquiétante.
Synopsis : Dans une cour d’école, 4 fillettes sont témoins d’un meurtre. Sous le choc, aucune n’arrive à se rappeler de l’assassin. 15 ans plus tard, 2 d’entre elles voudraient oublier…
Suite de Shokuzai – Celles qui voulaient se souvenir, avec le destin des deux autres petites filles qui avaient assisté au meurtre de leur amie 15 ans plus tôt. Alors que Sae et Maki ne vivaient que dans l’attente de remplir leur promesse d’enfant et de se racheter, Akiko et Yuka continuent leur vie loin de ce serment, la première repliée sur elle-même, la seconde dans l’espoir de mettre le monde à ses pieds.
L’histoire d’Akiko est assez bien racontée même si une fois encore, le scénario repose sur des coïncidences d’autant plus improbables qu’elles se multiplient, et sur l’omniprésence de la perversité. Yuka apporte un vent de fraîcheur presque inattendu à cette galerie de portraits dépressifs, puisque contrairement aux autres, elle refuse de subir le poids du passé.
Pourtant, comme chacune de ses anciennes amies, elle provoquera un drame. Partout dans Shokuzai, le destin contrôle les trajectoires des personnages, leur donnant à toutes (bénédiction ou malédiction?) l’occasion de venger le traumatisme de leur enfance.
C’est encore le cas dans le segment d’Asako, dans lequel la providence et la fatalité prennent une place encore plus conséquente. Le destin d’Asako semble être la synthèse de celui des quatre jeunes filles dont elle a modifié la vie à jamais, les forçant à prendre une part de responsabilité dans le drame de leur enfance. Ainsi, elle partage avec Yuka une jalousie maladive et destructrice, à l’origine de la tragédie. Suite au meurtre d’Emili, elle se montre démesurément sévère et intransigeante avec les amies de sa fille, comme Maki avec ses élèves. Les 15 années qui suivent sont pour elles un long calvaire, une période de repli sur soi, 15 années de réclusion qu’elle partage avec Akiko. Sur le modèle de Sae, elle retrouve finalement celui qui lui avait volé sa « poupée » dans le seul but de l’atteindre.
Les vengeances terribles de Sae, Maki, Asako et Yuka influenceront-elles les choix finaux d’Akiko? Et si cette dernière était coupable de tout, si c’était elle qui avait tout provoqué, qui avait créé cinq monstres et autant de destins tragiques?
Malgré son scénario invraisemblable et l’intérêt inégal de son récit, la fable nous fascine par la diversité de ses histoires et de ses personnages, et se révèle être une étude ample et vertigineuse de la culpabilité. Ce film froid et inquiétant dresse le portrait d’une société détraquée formée d’une constellation de solitudes névrosées.
Note : 6/10
Shokuzai – Celles qui voulaient oublier (titre original : Shokuzai 2)
Un film de Kiyoshi Kurosawa avec Kyôko Koizumi, Sakura Ando et Chizuru Ikewaki
Drame, Thriller – Japon – 2h28 – Sorti le 5 juin 2013

